30 mars 2013

Huit cents pieds sous terre

PARC NATIONAL DES CAVERNES DE CARLSBAD, Nouveau-Mexique. Depuis peu, nous fréquentons assidûment les grottes nord-américaines: l'été dernier, nous avions exploré "Wind Cave", un ensemble de boyaux plutôt étroits dans les montagnes noires du Dakota du Sud. Ce samedi, nous avons suivi une ranger dans les immenses salles des cavernes de Carlsbad, une enfilade de cathédrales ornées de stalactites (et mites), des draperies, de popcorn et autres formations de calcite fabuleuses. L'endroit, en ce week-end de Pâques, était très fréquenté, donnant à la surface un aspect plutôt pénible d'usine à touristes. Au fond de la grotte (800 pieds, soit 260 mètres sous terre), en revanche, quand le silence et l'obscurité absolus se font, l'on a le sentiment de vivre un moment particulier. Bizarrement, la découverte de ce réseau de cavités par les Blancs et leur exploration n'ont eu lieu qu'il y a 110 ans tout au plus, les Indiens du cru n'ayant jamais osé pénétrer dans l'ouverture du boyau considéré comme sacré. S'en échappent chaque soir des milliers de chauve-souris, qui vont chasser les insectes au bord du fleuve Pecos.

Renault limit!

Décidément, le sud-ouest des Etats-Unis est propice aux rencontres avec des voitures françaises. Il y a quelques années, nous avions surpris une Citroën DS au Canyon de Chelly en Arizona. Ce midi, au parc national des cavernes de Calrsbad, nous étions garés à côté d'une Renault "Fluence" toute neuve, une curiosité alors que les automobiles au losange ne sont plus commercialisées aux Etats-Unis depuis près d'un quart de siècle. Explication: cette Française expatriée était immatriculée au Mexique dans l'Etat de Chihuahua voisin du Texas. A deux heures de route de la frontière, de nombreux Mexicains viennent faire du tourisme chez leurs cousins yankees.

L'enfer blanc

CARLSBAD, Nouveau-Mexique. Nous avons entamé notre migration du retour vers l'Est, non sans avoir effectué une longue et aveuglante escale dans l'un des endroits les plus magiques qu'il nous ait été donné l'occasion de visiter depuis huit ans: le "monument national" de White Sands, une étendue de dunes de gypse au milieu du désert néo-mexicain. Conséquence d'un phénomène complexe de ruissellement et d'érosion, ces collines de sable d'une blancheur presque insoutenable se déroulent sur des kilomètres. Vu la réverbération, des gourdes bien remplies sont de rigueur pour arpenter ce Merzouga yankee, très fréquenté en cette saison par des familles équipées de luges en plastique. Les enfants dévalent les pentes en riant aux éclats, pendant que leurs parents se bourrent de tacos en palabrant autour de tables de pique-nique installées au milieu de cet erg immaculé. Encore sonnés par l'expérience, nous avons migré ce vendredi soir vers Carlsbad, ville de l'extrême sud-est du Nouveau-Mexique, voisine de deux autres parcs nationaux.

Vos papiers

Amis français ou non-américains, s'il vous prenait un jour l'idée d'aller passer vos vacances dans le sud du Texas ou du Nouveau-Mexique, n'oubliez surtout pas vos passeports: on vous les demandera beaucoup. De la départementale à l'autoroute six-voies, les routes proches de la frontière sont truffées de ces points d'inspection du CBP, à la fois douane et police aux frontières. Les contrôles sont systématiques et la question rituelle: "êtes-vous américains?" La réponse négative (car on ne ment jamais à un fonctionnaire fédéral, le parjure égale prison) vaut un examen poussé des passeports et des visas. Ces barrages, dotés de détecteurs, de scanners et de chiens renifleurs, sont l'une des manifestations du renforcement drastique des mesures de sécurité à la frontière américano-mexicaine, lancé après le 11-Septembre et que les républicains du Congrès veulent encore durcir avant d'accepter une réforme migratoire. En cinq jours, nous avons dû montrer patte blanche quatre fois.

28 mars 2013

A l'Ouest toute

LAS CRUCES, Nouveau-Mexique. Nous voilà arrivés dans la partie la plus occidentale de notre voyage printanier: cette ville du sud-est du Nouveau-Mexique n'est qu'à 11 heures de route de Los Angeles. Cela ferait presque envie! Mais demain, nous repartirons vers l'est où nous attendent d'autres merveilles naturelles, montagneuses et désertiques. En attendant, nous avons changé de fuseau horaire et vivons en harmonie avec les habitants de Denver.

Restons éveillés

Le nouveau format de chez Starbucks?

Fort à faire

Après Big Bend, et sur la route du Nouveau-Mexique, nous avons exploré ce jeudi un témoin de la glorieuse conquête de l'Ouest: Fort Davis, un des postes militaires situés sur les 1 000 km séparant San Antonio d'El Paso, le tronçon texan de la route de la ruée vers l'or californien de 1849. Il fallait alors trois mois pour effectuer cette traversée, dans une région infestée d'Apaches, grouillant de serpents à sonnette et transformée en fournaise l'été venu. Bref, les survivants gardaient toutes les chances de faire fortune dans la Sierra Nevada. Bien conservé, le fort dépourvu de murailles donne une bonne idée de la rude vie des soldats dans ces régions hostiles au milieu du XIXe siècle. Curiosité, Fort Davis, qui doit son nom au ministre de la Guerre de l'époque - et futur président de la Confédération - Jefferson Davis, abrita en particulier des soldats des premiers bataillons noirs, formés après la guerre de Sécession.

Ceci n'est pas une photo de notre hôtel


En quittant le bout du monde

Big Bend, pour reprendre une de nos expressions favorites, c'est loin mais c'est beau. Mais c'est quand même loin. Trois jours à faire au moins 350 km de route aller-retour pour aller admirer les différents écosystèmes de ce grand parc national nous ont légèrement saturés de bitume. Et pourtant, quel endroit! Des falaises volcaniques aux méandres paresseux du Rio Grande en passant par les mesas et les buissons d'ocotillos, ces curieux épineux couronnés de fleurs rouges en cette saison, nous avons été charmés par cette rude région. L'hiver et le printemps en constituent la saison haute: en été, l'endroit subit des températures diurnes de 47°C et les touristes se font rares. Mais même en cette saison de vacances de printemps, le spring break, l'affluence n'était pas étouffante et nous avons eu de très beaux paysages pour nous tout seuls. Exemple ci-dessus, les "oreilles de mule" dans la partie ouest du parc.

25 mars 2013

Rio Grande

C'est le printemps!


La théorie du Big Bend

Depuis le début de nos périgrinations en Amérique du Nord, voilà bientôt huit ans, nous avons vu le nord de l'Etat de Washington, le sud de la Californie, le sud de la Floride et le nord du Maine, autant de points extrêmes des Etats-Unis. Mais ce lundi, nous avons découvert un nouveau bout du monde de ce grand pays, aux confins de Big Bend, le grand parc national s'étalant au nord du Rio Grande. Et quelle route faut-il emprunter! Pas moins de deux heures pour couvrir la distance entre Alpine, notre repaire nocturne, et le sud du parc. Mais au bout, la récompense: le cañon de Boquillas, où le fleuve s'engouffre entre d'immenses falaises. Celle du sud, à droite sur la photo, est au Mexique, celle du nord aux Etats-Unis. Un petit sentier longe la rivière sur quelques centaines de mètres, l'occasion de croiser quelques Mexicains entrés illégalement chez l'oncle Sam en franchissant à cheval le paisible cours d'eau. Ils vendent quelques babioles aux touristes. Ces derniers risquent une saisie de la marchandise illégale, les Mexicains une reconduite à la frontière par le plus proche point de passage officiel, à 100 km de là...

24 mars 2013

Au pays de Lucky Luke

ALPINE, Texas. C'est officiel: nous sommes passés à l'ouest du Pecos. Cette rivière, un des repères marquant la "frontière" entre la civilisation et les terres sauvages au milieu du XIXe siècle, languit au fond d'un large canyon, résultat de la sécheresse qui s'abat sur cette région. Le grand réservoir Amistad, traversé par la frontière américano-mexicaine et alimenté par le Pecos et le Rio Grande, est dans un état encore plus préoccupant que le lac Powell quand nous y étions passés en 2008, à vue de nez au moins 30 mètres sous son niveau le plus élevé. Autant dire que les rampes d'accès au lac et les marinas font triste mine.

Mais revenons à nos périgrinations, en cette journée de dimanche qui nous a vu passer de la vibrante, culturelle et artistique San Antonio au trou poussiéreux minable pittoresque avant-poste désertique d'Alpine, 500 km plus à l'ouest. En traversant les plaines de plus en plus rocailleuses nous menant vers le désert, nous sommes passés à proximité de la bourgade de Langtry. Ca vous dit quelque chose? C'est là que sévissait le juge Roy Bean, personnage haut en couleur ayant réellement existé et emprunté à la légende de l'Ouest par Morris et Goscinny dans la BD de Lucky Luke "Le juge". Son slogan: "la justice à l'ouest du Pecos". Tout est dans tout, et inversement. D'Alpine demain lundi, nous avons l'objectif d'aller explorer le grand parc national de la région, Big Bend, aux confins des sierras mexicaines.

Bang bang


Sanctuaire texan

Avant de quitter San Antonio, nous avons rendu visite à la première attraction touristique du Texas, le fameux Alamo. C'est dans cette mission franciscaine, encore une, qu'une poignée de Texans résistèrent à un contre dix en 1836 face aux troupes de Santa Anna, général mexicain voulant reprendre le territoire qui tentait d'échapper à l'emprise de la jeune république. Bref, les défenseurs de l'Alamo se firent tous occire, non sans avoir infligé de lourdes pertes à l'ennemi du Sud, et entrèrent par la même occasion dans une légende qui n'a pas cessé d'enfler depuis.


Aujourd'hui, l'Alamo est un Sanctuaire avec un grand S, devant lequel a été érigé un cénotaphe (tombeau vide) portant les noms des héros, dont Davy Crockett et Jim Bowie. Le drapeau texan flotte haut sur ces vieilles pierres, et les touristes font sagement la queue pendant de longues minutes pour y pénétrer. Les Texans d'il y a 177 ans, galvanisés par la défaite, avaient ensuite fait subir une déculottée aux Mexicains lors d'une autre bataille, celle de San Jacinto, obtenant leur indépendance. La république du Texas ne vécut que neuf ans avant d'être annexée par les Etats-Unis en 1845. L'épisode fut bien sûr porté au grand écran par John Wayne (qui avait coiffé le bonnet de fourrure de Crockett) en 1960.

23 mars 2013

En mission pour le Seigneur

Pendant que le père Junipero Serra et ses disciples bâtissaient des missions sur la côte Pacifique, de la Basse-Californie à San Francisco, ses collègues franciscains s'efforçaient eux aussi de "civiliser" les Indiens du Texas, paisibles chasseurs et cueilleurs alors en plein désarroi en raison des épidémies et des attaques d'Apaches venus du Nord. Entre deux balades dans le centre de San Antonio, nous sommes allés rendre visite aux témoins de ce passé: quatre missions, dans un état de conservation étonnant, ont résisté aux siècles. Gérées par le service des parcs nationaux mais toujours consacrées, ces complexes d'églises et de bâtiments d'habitation pour les indigènes sédentarisés de force, communiquent malgré leur sérénité, un arrière-goût amer, celui du paradis perdu des premiers habitants d'Amérique du Nord.

San Antonio, dare dare

SAN ANTONIO, Texas. Fameuse intuition de la part des planificateurs urbains de San Antonio, le centre de la septième ville des Etats-Unis s'articule autour d'une promenade de bord de rivière, le "Riverwalk". Et cette attraction recueille un succès fou! Des milliers de touristes se pressent autour des berges de ce cours d'eau bien canalisé, pour manger des nachos, enchiladas, tacos et autres spécialités mexicaines (nous ne sommes ici qu'à 200 km de la frontière) ou tout simplement flâner.


 Nous avons nous-mêmes bien arpenté les lieux, en descendant le cours d'eau vers les quartiers sud, où des magnats texans, surtout des marchands de bétail, ont construit de belles bâtisses à la fin du XIXe siècle. A cet endroit, la rivière prend un aspect presque bucolique et les sentiers sont désertés par les grappes de touristes. C'est qu'il faut marcher au moins 800 mètres, de quoi effaroucher nos amis Américains les moins hardis...
P.-S. Le titre est bien sûr un clin d'oeil à Frédéric Dard, qui avait choisi le nom de son héros en pointant au hasard sur la carte des Etats-Unis, car il cherchait un patronyme anglo-saxon. Nous avons échappé aux aventures du commissaire Albuquerque!

Vous avez dit bizarre

AUSTIN, Texas. Et de quarante! Nous avons atterri vendredi au Texas, Etat qui, nous est-il rappelé à grand renforts d'autocollants et de T-shirts dans les boutiques de souvenirs, est "plus grand que la France". L'Etat de J.R., de George W. Bush, des cow-boys, des puits de pétrole et des pick-ups géants possède une capitale pas du tout à son image, Austin. A quelques kilomètres du Capitole où siègent les élus ultra-conservateurs, pourfendeurs du gouvernement fédéral et de la théorie de l'évolution, se trouve en effet le quartier "South Congress", où les boutiques d'antiquités loufoques côtoient des motels des années 1930, et dont les trottoirs sont arpentés par une jeunesse tatouée aux cheveux bleus. Car Austin (où il faisait 30°C), c'est aussi le siège du festival "South by Southwest", tempête de cerveau de renommée mondiale, mais tendance "jeune très en avance sur la mode", en un mot, "hipster". Ce cocktail étonnant est résumé dans le slogan de l'endroit: "Keep Austin weird". "Qu'Austin reste déjantée".

21 mars 2013

Réfugiés météorologiques

BETHESDA, Maryland - Le printemps ne vient pas, nous partons à sa rencontre. En nous rendant demain vendredi à Austin puis San Antonio au Texas, nous allons gagner facilement 25°C sur nos actuelles gelées matinales et anormales, qui intimident encore les bourgeons des cerisiers du bord du fleuve Potomac.